Edito
Situation exceptionnelle sur les chantiers
Ce n’est pas original de le dire en ce moment : la situation est sans précédent !
L’épidémie de Covid 19 est arrivée brutalement, impactant de nombreux domaines d’activité.
Le BTP est de ceux-là.
Les chantiers sont arrêtés pour une durée… indéterminée.
Les conséquences, à court et moyen termes, sont nombreuses, et parfois difficiles à identifier.
Concernant le BTP, essayons d’apporter notre pierre à l’édifice !
La fédération des travaux publics, par la voix de son président régional, nous fait part de sa vision dans cette édition.
Que s’est-il passé depuis le 12 mars ? De nombreux textes sont apparus :
- Les arrêtés des 13, 14 et 15 mars,
- Le décret du 16 mars,
- Les recommandations des ministres pour la continuité de services le 21 mars,
- L’instruction du ministre du Travail du 17 mars,
- Les arrêtés préfectoraux.
Sur ces bases, le télétravail s’est mis en place, pendant que l’activité de chantier s’arrêtait dès le 17 mars.
Le temps de réagir, et l’identification des missions essentielles durant la période de confinement a été faite pour les services techniques publics :
- Réparations d’urgence
- Gestion des crises sur le domaine public
- Astreintes
- Maintien de la chaîne comptable
Les autres activités de chantier étant mises en sommeil.
Parallèlement, la chaîne logistique des chantiers s’est arrêtée dans le secteur privé.
Nous sommes devant :
- Une interruption presque complète de l’activité sur une durée de plusieurs semaines,
- Une reprise de l’activité dans des conditions à adapter,
- Une nécessaire continuité des outils de production.
Sortir du confinement et initier la reprise de l’activité va nécessiter d’être vigilant sur deux points :
- Il faut que la chaîne de commandes publiques fonctionne ; le maître d’ouvrage lance des consultations, les maîtres d’œuvres et entreprises restent en capacité de répondre.
- Il est primordial d’apporter aux acteurs du chantier, des conditions de travail sécurisées, en concertation avec les intéressés. Dans de nombreux cas, il faudra actualiser le document unique, repenser les modalités de travail.
Ces deux actions sont engagées dès maintenant pour assurer la reprise.
Souhaitons que ces mesures soient à la hauteur pour permettre le retour de la confiance.
Et demain, quelles questions ?
- Sommes-nous dans un cas de force majeure ? Qui doit assurer la sécurité des ouvriers, et qui doit être solidaire dans cette épreuve ? La réponse à cette question a obligatoirement un impact sur les relations contractuelles à venir.
- Quelle équité entre tous les acteurs de la construction, qu’ils soient en télétravail, en chômage partiel, en congés, au travail ? Quelle sera la place du droit de retrait lors de la décision de reprise?
Nous aurons ces débats au cours de l’année, et nous les retrouverons dans les prochains numéros de la gazette de Sologne Ingénierie.
Michel Rotat
L'info du mois
La mobilité va-t-elle devenir « virtuelle » ?
Le premier robot est apparu dans une pièce de théâtre à Prague en 1920. Dans cette pièce, le robot est présenté comme une menace !
Il a fallu, plusieurs décennies plus tard, qu’Asimov donne un visage humain au robot, pour que l’on cesse de le considérer comme une menace, et qu’on le traite comme un partenaire de notre vie quotidienne.
Qu’en sera-t-il des réseaux Internet, et de leur impact sur notre vie en général, sur la mobilité en particulier.
Pourquoi cette question ?
Parce que la 5G à peine arrivée, on nous parle déjà de la 6G.
On annonce la 6G, capable de faire « tomber les barrières entre les mondes physiques et numériques ».
La bande de fréquence « térahertz » utilisée par la 6G va rendre possible le développement d’une interface neuronale directe, en reliant le cerveau humain directement à l’ordinateur ; et en transformant les impulsions neuronales en signaux numériques.
Dis comme cela, ça fait peur !
Et pourtant, la 6G pourrait arriver dès 2030.
Chaque génération a ouvert de nouveaux usages :
- La 3G : l’Internet marchand,
- La 4G : le smartphone et les plateformes numériques qui nous ont permis d’être ?« seul ensemble » et de gérer autrement notre mobilité.
- La 5G : l’économie numérique et l’industrie intelligente.
On nous annonce que la 6G devrait permettre l’émergence de robots intelligents : la voiture intelligente, plus tard la voiture autonome.
Qu’on le veuille ou non, avec ou sans pandémie, notre vie va changer, notre travail aussi.
Mais nous aurons encore besoin :
- Du tuyau d’eau potable pour nous alimenter.
- De la route pour nous déplacer.
La parole à...
Trois questions à François Huret, Président de la FRTP (Fédération Régionale des Travaux Publics), région Centre-Val de Loire.
La rédaction : La décision de confinement intervenue le 16 mars a impacté le BTP ; que s'est-il passé en région Centre-Val de Loire ?
François Huret : Suite à la « déclaration de guerre » au virus annoncée par le chef de l’État, il s’est passé ce qui était le plus logique pour tous les acteurs de l’industrie des Travaux Publics : la mise à l’arrêt de quasiment toute la chaîne de production des chantiers.
Les fournisseurs de matériaux et matériels ont fermé leurs enseignes et les deux tiers des maîtres d’ouvrage ont demandé l’arrêt ou l’ajournement de leurs chantiers.
Face à tout cela, les chefs d’entreprise des Travaux Publics ont pris la seule décision valable à cet instant puisqu’ils ne pouvaient plus travailler : protéger la santé et la sécurité de leurs salariés et répondre à la demande de confinement général du gouvernement.
Nous avons fait une enquête auprès de nos adhérents entre le 23 et le 26 mars, les résultats sont éloquents : 85 % des entreprises étaient en arrêt total. Et les entreprises qui tournaient encore étaient à moins de 25 % de leur activité habituelle.
Pour notre Fédération, depuis le 16 mars au soir, c’est la mobilisation générale. Cet arrêt brutal a posé beaucoup de problèmes aux entrepreneurs. Nous sommes plus que jamais à leurs côtés pour les accompagner dans cette période inédite où les vérités du matin ne sont pas celles de midi et encore moins celles du soir. Dans ce tumulte, nous avons toujours gardé notre cap : sécuriser nos entreprises et protéger nos salariés.
Comment protéger les salariés du BTP, sur le chantier, dans leur transport sur site ?
F. H. : C’est LA question ! C’est celle qui conditionne la reprise des chantiers. Dès le 17 mars, nous avons demandé à l’État qu’il décide d’un arrêt des chantiers pour dix jours afin que nous puissions nous organiser pour mener nos chantiers en évitant de contribuer à la propagation du virus. On nous a non seulement opposé un refus, mais en plus nous nous sommes fait traiter de « défaitistes » par la ministre du Travail. C’est dommage car, au-delà de ces propos malheureux, nous avons surtout perdu un temps précieux pour nous organiser.
Néanmoins, puisque nous sommes combatifs, nous avons proposé à l’État l’élaboration d’un guide de préconisations pour réaliser les chantiers en intégrant les mesures et gestes barrières indispensables pour lutter contre la propagation du virus et éviter in fine d’encombrer les services de réanimation des hôpitaux. Ce guide, validé depuis le 23 mars par les trois fédérations professionnelles et les quatre organisations syndicales du BTP, ne l’est toujours pas par l’État le 1er avril… preuve sans doute que ce n’est pas si simple que cela.
Un chantier, c’est complexe, il y a beaucoup d’interactions, de coactivité sur le chantier. Quant au transport des salariés, on ne pourra pas doter chacun d’un véhicule. Il faut donc faire un gros travail, chantier par chantier, pour voir les moyens mobilisables et l’organisation qu’il est possible de mettre en œuvre. Sans oublier que l’élément essentiel et indispensable aux chantiers, ce sont les femmes et les hommes de nos entreprises. De même que pour tous les acteurs d’un projet. Et aujourd’hui, il faut être conscient d’une réalité : les salariés ont peur. Peur pour eux, pour les membres de leur famille et pour les autres. Car avant d’être des salariés, ce sont aussi des citoyens qui entendent parfaitement les messages des soignants qui leur disent à juste titre de rester à la maison.
Dans les Travaux Publics, nous faisons équipe avec nos salariés. Aucun chef d’entreprise ne prendra le risque d’exposer ses salariés si les conditions de sécurité préconisées ne peuvent pas être mises en œuvre.
Le guide de préconisations sera un outil précieux, mais il ne sera pas l’outil qui relancera d’un coup de baguette magique la reprise de l’activité.
Comment imaginer la reprise de l'activité, comment peuvent se dérouler les neuf mois restants de l'année 2020 ?
F. H. : Sans faire montre de pessimisme, ce sera plutôt sur les huit prochains mois, car le mois d’avril est déjà largement compromis. Mais si on ne veut pas qu’il soit perdu, il faut que nous nous mobilisons tous. Et maintenant ! Quand j’entends tous, ce sont les entreprises bien sûr, mais aussi les maîtres d’ouvrages, les maîtres d’œuvre, les fournisseurs, les coordonnateurs SPS, … Tous ensemble, il est de notre responsabilité de nous retrouver autour de la même table, virtuelle pour l’instant, pour étudier de manière concrète et concertée comment relancer les chantiers, les prioriser, aider au règlement des éventuels différents, et ce, afin que nous relancions le plus rapidement possible l’activité en veillant à ne pas mettre en péril les entreprises et les emplois.
Cette reprise sera progressive pour les raisons déjà évoquées. Autant l’arrêt a pu se faire assez rapidement, autant la reprise pose de multiples questions. La sécurité et la santé des salariés bien sûr qui posent des questions très concrètes : comment mettre en place les mesures de préconisations, comment s’approvisionner en masques, en gel,… qui assumera le coût de ces mesures nouvelles non prévues initialement au contrat ? Mais aussi, quid des DT DICT qu’il va falloir refaire ? des approvisionnements ? … Beaucoup de questions que nous devons traiter pour reprendre au mieux et au plus vite les chantiers.
Mais il faut avoir à l’esprit que nous devons aussi préparer la reprise d’après la crise. La machine ne s’est pas uniquement arrêtée sur les chantiers, elle s’est arrêtée aussi, ou très fortement ralentie, chez nos clients et partenaires. C’est pourquoi, j’appelle les maîtres d’ouvrage à reprendre le chemin des projets et à alimenter les entreprises en appels d’offre sans tarder. Les projets qui sortiront maintenant seront étudiés et cela donnera des perspectives aux entreprises et aux salariés. Cela donnera surtout un élan au marché pour lui permettre de retrouver un rythme de fonctionnement plus habituel.
La Fédération sera présente sur tous ces sujets pour travailler aux côtés des maîtres d’ouvrages et de tous les partenaires qui le souhaiteront.
Merci Monsieur Huret.
La photo commentée
Sans mobilité, le lien social n'est plus le même !
Sujet en débat
Le retour de la végétation spontanée
La « végétation spontanée », ce sont les innombrables herbes et flores qui se développent sur les moindres interstices de murailles, béton, asphaltes et enrobés.
Elles envahissent les différents espaces du domaine public, murs, trottoirs, chaussées, parkings, parcs.
Au cours des dernières décennies du vingtième siècle, les pouvoirs publics ont arrosé ces « indésirables » de quantités d’herbicides, de produits chimiques au glyphosate, comme le célèbre « Roundup ».
C’était une période où l’on considérait que tout ce qui poussait entre les pierres, ou les interstices du bitume, était de mauvaises herbes.
Depuis, avec l’interdiction du glyphosate, notre regard a changé sur ce point.
Les recherches effectuées sur ce sujet remontent à 1850, un botaniste anglais ayant remarqué et étudié la flore qui se développait sur les bâtiments de l’époque romaine à Rome.
Depuis, c’est en Allemagne, et en Europe de l’Est que des spécialistes ont poursuivi l’observation de ce phénomène.
En effet, les parcs, zones industrielles, nouveaux quartiers, cimetières, voies rapides, gares de triage sont autant d’endroits aux caractéristiques intéressantes, en termes d’humidité, d’ensoleillement, de nutriment, de fréquentation.
C’est ainsi que l’on a vu une flore consommatrice d’une grande quantité d’azote, se développer en raison de déjections canines.
Une grande variété de plantes peut se développer sur ces espaces, en fonction du support, de l’environnement, de la fréquentation.
Citons, au hasard, la renommée des oiseaux, l’armoise, le trèfle, le mouron blanc, l’orge des rats, le robinier.
Que faire aujourd’hui de cette flore ?
À long terme, cela coûte cher d’éliminer toute cette végétation spontanée. C’est un combat perdu d’avance, car ces plantes sont des durs à cuire, et le traitement à l’eau chaude qu’on leur réserve aujourd’hui n’a qu’un effet limité.
La vraie question est : dans quelle mesure cette flore est-elle néfaste à la pérennité du patrimoine, pierre, asphalte, etc. ?
Le sujet est régulièrement abordé lors des travaux d'entretien routier, entre maître d'ouvrage, maître d’œuvre et entreprise.
La réponse est à apporter au cas par cas, mais avec un regard plus tolérant que nos aînés sur ces plantes !